La perversion narcissique, un fléau pour le couple


La perversion narcissique est un sujet de plus en plus médiatisé ou débattu ces dernières années dans notre pays et plus largement dans nos sociétés modernes. Il faut dire que l'expression n'est pas bien vieille puisque c'est en 1986 qu'un psychanalyste, Paul Claude RACAMIER, a identifié et nommé la perversion narcissique. Cet éminent praticien a passé la dernière moitié de sa carrière à étudier et décrire les contours de ce trouble du comportement.

Dans un couple, ce type de relation déviante mène irrémédiablement à la séparation, au divorce. Vivre aux côtés d'un pervers narcissique est un supplice qui peut conduire au gouffre.

Qu'est ce qu'un pervers narcissique ?

Pour reprendre les mots de Paul Claude RACAMIER, la perversion narcissique est une « façon organisée de se défendre de toute douleur et contradiction internes et de les expulser pour les faire couver ailleurs, tout en se survalorisant, tout cela aux dépens d’autrui et non seulement sans peine, mais avec jouissance ».

Il s'agit d'une pathologie qui peut toucher tous les individus, homme ou femme, vieux ou jeunes, de tous les milieux sociaux, de tous les niveaux d'éducation... Le psychanalyste écrit aussi qu'il y a chez le pervers narcissique "une propension active du sujet à nourrir son propre narcissisme aux dépens de celui d'autrui".

La manipulation dans le concept de perversion narcissique

Généralement, le pervers narcissique est un manipulateur ou une manipulatrice dont on dit facilement qu'il ou elle a deux visages, une sorte de double façon d'être. On parle de personnes qui sont habituellement plutôt appréciées en société mais quand le rideau tombe, il y a un profond besoin d'avoir petit à petit le contrôle d'autrui et nous ne sommes pas tous égaux face aux pervers narcissiques.

Contrairement à ce qu'on pourrait imaginer, la personnalité d'un pervers narcissique est plutôt fragile même si émane de lui une forme de confiance et d'assurance. Un pervers narcissique, quand il a choisi sa proie, instille lentement mais sûrement son contrôle sur elle. Il y a une volonté de maîtriser la relation pour empêcher toute forme d'abandon et plus largement toute forme de libre arbitre.

Attention, tous les pervers narcissiques sont des manipulateurs mais tous les manipulateurs ne sont pas forcément des pervers narcissiques. Il faut bien comprendre que la perversion narcissique implique aussi une toxicité de la relation puisqu'il y a un besoin de dévalorisation de l'autre pour se mettre en valeur.

Dans nos accompagnements des couples en situation de séparation ou de divorce, nous avons constaté que cette expression était trop facilement utilisée pour justifier la rupture. En réalité, les pervers narcissiques ne sont pas à tous les coins de rue et s'il faut en effet se poser des questions quand on vit une relation qui prend des airs de purgatoire, il vaut mieux se garder des conclusions hâtives.

Pervers narcissique et troubles narcissiques

Le trouble de la personnalité narcissique est un trouble dans lequel l'individu a un besoin effréné d'être admiré, adulé et encensé.

Egocentrique, principalement intéressé par lui-même, le pervers narcissique peut avoir une sérieuse tendance à la mégalomanie et faire preuve de très peu d'empathie et de dévouement. La remise en question n'est pas le fort d'un pervers narcissique, il part du principe qu'il a raison et reporte la faute sur sa ou ses victime(s).

Il cherche les compliments dans tous les domaines, son désir de reconnaissance est insatiable et s'assouvit généralement aux dépens d'autrui. 

La perversion chez le pervers narcissique

Un pervers narcissique va chercher à abîmer, à dévaloriser l'autre pour mieux s'en servir comme faire-valoir. La relation sera inévitablement destructrice même si elle peut perdurer des années avant que les dégâts ne soient réellement visibles et identifiés comme issus de ladite relation.

Une fois l'emprise installée sur l'autre, le pervers narcissique n'aura de cesse de le déprécier et plus la relation perdure, plus nombreux sont les leviers pour appuyer sur les failles et faiblesses de sa victime. La domination psychologique met parfois longtemps à s'établir, c'est fonction aussi de la vulnérabilité de celui ou celle qui est la proie du pervers narcissique. Une personnalité forte avec des repères solides et un entourage attentif sera moins susceptible d'être prise dans les filets d'un pervers narcissique mais ça arrive néanmoins plus souvent qu'on ne l'imagine.

La perversion peut se manifester de différentes manières dont le dénominateur commun est le besoin d'humilier ou d'écraser l'autre pour se mettre en avant. Le pervers narcissique prend plaisir à cela, il n'éprouve pas d'empathie à l'égard de sa victime, il peut même s'appuyer sur la souffrance de l'autre pour nourrir sa supériorité.

Identifier un pervers narcissique

Seul un professionnel sera capable de diagnostiquer la perversion narcissique qui est, rappelons-le, une véritable pathologie.

Si vous pensez que votre conjoint(e) présente les signes d'une perversion narcissicique qui vous empoisonne la vie, il est important de consulter et de comprendre les mécanismes qui se jouent dans votre couple.

Le pervers narcissique a généralement deux visages

En société, le pervers narcissique est souvent une personne joviale et appréciée qui cherche à être aimée de tous et c'est d'ordinaire le cas. Citons les propos de P.C.RACAMIER, premier spécialiste du sujet, qui écrivait ceci;

"le pervers narcissique accompli se montre solialisé, séducteur, socialement conforme et se voulant supernormal : la normalité, c'est son meilleur déguisement".

Ainsi, il est fréquent que l'entourage de la victime n'ait pas la moindre idée de ce qui se trame dans le couple puisque le pervers narcissique s'adapte à son auditoire et s'applique à le séduire en permanence.

Cependant, lentement mais sûrement, s'installe une forme de dépendance affective que la victime elle-même ne voit pas venir. En privé, le pervers narcissique aura toujours raison, son humeur est changeante, il a la critique facile et ne cesse de blâmer l'autre, générant à la longue une réelle mésestime de soi pour celui qui est sous son contrôle.

Autre éminente psychothérapeute qui s'est consacrée à la perversion narcissique, notamment dans le cercle familial et la sphère du couple, Marie-France HIRIGOYEN décrit bien cet état de fait;

"Le pervers narcissique pratique la confusion des limites entre soi et l'autre. Il incorpore les qualités de l'autre, les attribue à son soi grandiose, pour pallier à sa faiblesse du moi. Ces qualités appropriées, il les dénie à leur véritable possesseur". 

Il arrive fréquemment que le pervers narcissique se montre extrêmement jaloux dans la sphère privée. La jalousie est d'ailleurs un terreau fertile pour y faire pousser de la culpabilité chez l'autre et c'est aussi sur cette culpabilité que le pervers narcissique peut continuer à incruster sa domination.

Le pervers narcissique isole sa victime

Encore une fois, c'est P.C.RACAMIER qui nous éclaire sur ce qui se joue dans cette maladie; "son procédé majeur, son arme devrais-je dire, c'est la disjonction. Il s'agit de disjoindre les personnes, les informations, les pensées : il s'agit toujours de rompre des liens."

La plupart des victimes de perversion narcissique dans leur couple décrivent un isolement lent et minutieux à l'initiative de leur partenaire. Au fil du temps, ils perdent leurs amis, le cercle de proches s'amoindrit et c'est souvent très tardivement qu'ils prennent conscience que leur entourage a complètement changé et qu'ils n'évoluent plus qu'avec des gens que l'autre a choisis, sélectionnés même diront certains...

Dans son livre, "le pervers narcissique et son complice" paru en 2012, A.EIGUER explique que "le pervers narcissique essaie de maîtriser la relation à l'autre, en maintenant par divers procédés un état de dépendance réciproque". L'objectif est bien entendu d'éviter que les proches de la victime ne se rendent compte de ce qui se trame et tentent alors de la raisonner. Une des techniques bien connues du pervers narcissique est donc de diviser pour mieux régner et d'isoler pour renforcer sa toute puissance et son opression.

Le pervers narcissique peut se victimiser pour renforcer son emprise

Marie-France HIRIGOYEN explique que "le pervers narcissique essaie de pousser sa victime à agir contre lui pour ensuite la dénoncer comme mauvaise. Ce qui importe, c'est que la victime se sente responsable de ce qui lui arrive".

Il y a une projection sur l'autre de ses propres erreurs ou points de manque, le pervers narcissique ne se remet jamais en question mais n'hésite pas à inverser les rôles pour se placer dans la position de celui ou celle qui endure afin que l'autre se sente fautif et indigne.

Certains parlent de 4 piliers sur lesquels reposerait la perversion narcissique : Séduction, Victimisation, Culpabilisation et Intimidation.

Dans son ouvrage "les pervers narcissiques à charge et à décharge", l'auteur Patrick Louis RICHARD explique que "la perversion narcissique se nourrit de la victimisation qu'elle entretient pour exister, là où ses manipulations et ses mensonges l'ont amenée". Il ajoute plus loin que "les pervers narcissiques ne s'attachent à l'opinion des autres que quand les autres partagent leur opinion" et c'est parfaitement logique, ils s'en servent même pour convaincre leur victime que tout le monde partage leur point de vue.

Détecter et soigner le pervers narcissique

La perversion narcissique est un trouble de la personnalité assez complexe à diagnostiquer. Avant tout, il faut rappeler que le pervers narcissique n'est pas enclin à la remise en question et niera donc tout dysfonctionnement qui lui serait imputé directement. Difficile par conséquent de lui faire prendre conscience qu'il faut qu'il soit pris en charge.

Identifier la perversion narcissique, ses causes 

Comme pour la plupart des troubles psychologiques, l'origine de la perversion narcissique est compliquée à retracer. Les chercheurs et spécialistes s'accordent cependant pour dire que l'enfance joue un rôle prépondérant dans cette pathologie.

Une enfance dysfonctionnelle pourrait donc expliquer la naissance de ce trouble (enfant négligé ou abusé, enfant sur lequel ont été posées des exigences disproportionnées, un parent atteint lui-même de ce trouble de la personnalité, surprotection ou survalorisation de l'enfant...).

Certains contextes ou certaines circonstances peuvent donc déclencher une perversion narcissique, citons notamment ;

- L'incapacité à développer des sentiments d'empathie et de sollicitude

- Une disproportion des attentes parentales pendant l'enfance, les parents ont mis une énorme pression sur l'enfant

- Un père ou une mère pervers(e) narcissique, l'enfant s'est conformé aux comportements déviants de ce parent

- Rejet et problématiques de socialisation et d'appartenance à un groupe durant l'enfance ou l'adolescence

- Réaction en défense à des traumatismes ou des abus durant l'enfance

- Absence ou manque de reconnaissance et d'affection dans la construction de la personnalité ...

Qui est atteint de perversion narcissique ? Les "symptômes" du pervers narcissique

On parle plus courrament de pervers narcissique que de perverse narcissique et même s'il est établi que ce trouble de la personnalité touche plus communément les hommes que les femmes, il ne faut pas réserver cette pathologie à la gent masculine.

Les manifestations de ce trouble de la personnalité sont nombreuses, on peut citer les principales pour avoir une idée de la symptomatologie type de la perversion narcissique;

- L'apparence (trompeuse) d'un individu qui a une totale confiance en lui, une sorte de supériorité aux autres

- Un orgueil qui peut paraître démesuré mais qui ne s'exprime pas de la même manière chez tous les pervers narcissiques puisque certains cachent ce trait de caractère derrière de la fausse modestie. Il séduisent même parfois en se servant d'une humilité de façade.

- Une incapacité à la remise en question et à l'introspection, le pervers narcissique rejette systématiquement la faute ou le problème sur autrui.

- Une volonté de tout maîtriser, ne rien laisser au hasard et être continuellement dans le contrôle de tout et de tous ceux qui forment son entourage proche.

- L'éternelle quête de reconnaissance, le besoin d'être admiré, indispensable, inestimable.

- La manipulation pour servir sa cause quel que soit l'interlocuteur, le pervers narcissique active tous les leviers pour assurer sa suprématie sur sa ou ses victimes. Il met en place des stratégies diverses et variées pour servir ses objectifs et manoeuvrer dans le sens de ses seuls intérêts.

- Le manque d'empathie, le pervers narcissique n'a que peu de considération pour la souffrance de l'autre.

- L'ambition et l'arrivisme, la haute opinion qu'il a de lui-même pousse le pervers narcissique à écraser les autres pour parvenir à ses fins dans tous les domaines.

- Le désintérêt pour les autres à moins qu'ils ne lui soient utiles dans ses quêtes, un pervers narcissique se fiche de tous ceux qui ne l'aduleraient pas ou ne lui serainet pas profitables.

- Le plaisir de faire souffrir l'autre. Il y a une forme de délectation, de satisfaction dans le fait de déprécier autrui, le pervers narcissique aime la domination qu'il crée et il se réjouit d'amoindrir l'autre.

- La susceptibilité et l'incapacité à accepter la remise en cause ou les réflexions qui lui seraient destinées. Le pervers narcissique ne tolère pas la critique, il déplace la responsabilité sur les autres et refuse toute forme d'opposition ou de reproches.

- La jalousie est souvent un trait de caractère des individus pervers narcissiques. Ils peuvent être jaloux d'un tiers qui aurait des liens avec l'objet de leur perversion, la victime mais ils peuvent aussi être jaloux, envieux de la réussite ou du succès d'une personne de leur entourage.

- L'incapacité à recevoir des conseils extérieurs, la vanité du pervers narcissique l'empêche d'accepter une aide qui remettrait en cause son contrôle absolu.

La liste est loin d'être exhaustive et rappelons ici que le pervers narcissique excelle dans l'art de se faire passer pour une personne irréprochable que tout le monde aspire à mieux connaître.

Le déficit de confiance en soi est pourtant souvent à l'origine de la naissance d'une perversion narcissique. Paradoxalement, le pervers narcissique manque au départ d'estime pour lui-même. Des spécialistes recherchent des causes génétiques ou neuropsychologiques pour expliquer des cas de perversion narcissique en l'absence d'une enfance dysfonctionnelle. A ce jour, les contours de l'origine de ce trouble sont donc encore assez flous mais une chose est sûre, s'il n'est pas traité, les complications sont fréquentes.

Complications du trouble de perversion narcissique

Un pervers narcissique qui n'est pas diagnostiqué et accompagné dans un travail thérapeutique pour se sortir de ce trouble sera sujet à des déviances susceptibles d'aggraver son état. La dépression apparaît comme une complication notoire mais un pervers narcissique est aussi plus disposé à l'addiction, qu'il s'agisse de drogues, d'alcool ou de médicaments... Il est fréquent que le pervers narcissique ait des difficultés relationnelles, il passe par des phases d'inaptitude à la socialisation avant de trouver sa place et de maîtriser les armes qui seront les siennes.

Soigner une personne qui est atteinte de perversion narcissique est parfois cause perdue du fait du déni total qui caractérise généralement le malade. Un pervers narcissique n'a pas forcément conscience de manipuler et de dénigrer autrui, il se cache derrière une normalité qu'il estime impossible à remettre en cause, c'est presque toujours un malade qui s'ignore.

Ce constat est malheureux puisqu'il existe des thérapies adaptées au traitement de ce trouble, la psychothérapie est un précieux outil qui permet de faire évoluer les perceptions du pervers narcissique et une fois que ce dernier prend véritablement conscience de son état, il est possible de l'amener vers la correction de sa pathologie.

Des spécialistes incitent à combiner trois sortes de thérapie; la thérapie de groupe, la thérapie familiale et bien entendu, la thérapie individuelle. Il sera parfois nécessaire de recourir à des médicaments type antidépresseurs ou anxiolytiques en plus de ce triple suivi.

Comment se défaire, comment se libérer d'un pervers narcissique ?

Vous vous doutez que la problématique est délicate puisque par nature, le pervers narcissique est en toute puissance et refuse les remises en question. Par conséquent, si vous êtes victime d'une relation axée sur la perversion narcissique et que votre "bourreau" n'est pas en capacité d'identifier et d'assumer la déviance de ses comportements, il est impératif de vous protéger et de sortir de ce lien toxique.

Même si cela vous paraît extrême ou insurmontable, la rupture nette est sans doute la seule issue raisonnable et si vous devez en passer par un divorce, entourez-vous des meilleurs professionnels. Il est probable que votre relation vous ait éloigné de votre entourage et la solitude relative dans laquelle vous vous sentez peut vous faire craindre un total isolement. Rassurez-vous, vos proches reviendront probablement naturellement vers vous pour vous soutenir dans cette épreuve et vous constaterez que les langues se délient et que vous vous êtes voilé la face des années durant.

Se faire aider pour sortir d'une relation de perversion narcissique

Partager sa vie avec un pervers narcissique n'est jamais anodin et vous avez été fragilisé(e) par ce lien vénimeux. Sans vous en rendre compte, il est probable que votre personnalité se soit adaptée aux agressions subies, vous avez perdu toute ou partie de votre estime pour vous-même. L'isolement, la culpabilité, la fragilité et le manque de confiance peuvent facilement conduire à la dépression. A ce titre, il est sans doute essentiel de faire appel à un professionnel pour vous sortir de cette impasse dans laquelle vous pensez être coincé(e).

Outre le soutien psychologique et moral qu'un thérapeute est en mesure de vous apporter, un travail de réappropriation de vos repères sera mis en place et vous allez recouvrer estime et confiance en vous au fur et à mesure des séances.

Pour celles et ceux qui ne se sentent pas encore capables de passer le cap et d'aller rencontrer un thérapeute en cabinet, nous les incitons à essayer au moins d'échanger avec nos psychologues partenaires de chez Psy&You ils proposent une réduction à nos utilisateurs et vous pouvez en bénéficier en suivant ce lien.

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L'enfer de la relation avec un pervers narcissique

Sur la toile, les témoignages ne manquent pas et depuis que la perversion narcissique occupe le devant de la scène médiatique, pas une semaine ne se passe sans que de nouvelles victimes ne sortent du silence.

Libérer la parole est toujours une excellente initiative mais nous voulons profiter de cet article pour mettre en garde contre les amalgames. Comme évoqué plus haut, un manipulateur n'est pas nécessairement un pervers narcissique, de même qu'un égoïste, un insensible ou un présomptueux. Attention donc à ne pas confondre une personnalité pleine de défauts avec cette déviance pathologique qui revêt des caractéristiques variées et nécessite une approche thérapeutique pour valider son diagnostic.

Pour aider nos utilisateurs qui seraient dans le doute face à leur partenaire et la relation qu'ils vivent avec lui, nous avons repris ici des extraits de témoignages aussi divers que variés, reçus sur notre site ou sélectionnés dans la littérature sur le sujet.

L'objectif est de vous permettre d'y voir plus clair dans les signes concrets d'une relation avec un pervers narcissique mais encore une fois, seul un praticien habilité pourra assurer qu'un individu souffre de ce trouble.

Dans leur livre "le décodeur des pervers narcissiques", les auteures, Hélène GEST et Valérie GUELOT écrivent ceci;

Séduction, emprise, dévalorisation, isolement... Certaines relations, sous une apparence bienveillante et sympathique, se révèlent en réalité toxiques et tellement sournoises que l'on ne s'aperçoit que trop tard de leur dangerosité. Si vous reconnaissez vos rapports avec quelqu'un dans ces quelques termes, peut-être êtes-vous déjà victime de ce que l'on appelle un « pervers narcissique ».

Souvent cité comme ouvrage de référence, le livre de Marie-France HIRIGOYEN, "Le harcèlement moral, la violence perverse au quotidien", a été traduit dans 24 langues et le succès de cet essai illustre combien on sous estime l'ampleur de ces relations nocives.

Il nous a paru intéressant d'en citer l'extrait qui suit ;

Le propre des pervers est d'avancer masqué. Ils culpabilisent à outrance leur proie, ne supportent pas d’avoir tort, sont incapables de discussions ouvertes et constructives ; ils bafouent ouvertement leur victime, n’hésitant pas à la dénigrer, à l’insulter autant que possible sans témoins, sinon ils s’y prennent avec subtilité, par allusions, tout aussi destructrices, mais invisibles aux regards non avertis.

Comme les vampires, le Narcisse vide a besoin de se nourrir de la substance de l’autre. Quand il n’y a pas la vie, il faut tenter de se l’approprier ou, si c’est impossible, la détruire pour qu’il n’y ait de vie nulle part. Les pervers narcissiques sont envahis par un autre dont ils ne peuvent se passer. Cet autre n’est même pas un double, qui aurait une existence, seulement un reflet d’eux-mêmes. D’où la sensation qu’ont les victimes d’être niées dans leur individualité. La victime n’est pas un individu autre, mais seulement un reflet.

Toute situation qui remettrait en question ce système de miroirs, masquant le vide, ne peut qu’entraîner une réaction en chaîne de fureur destructrice. Les pervers se nourrissent de l’énergie de ceux qui subissent leur charme. Ils tentent de s’approprier le narcissisme gratifiant de l’autre en envahissant son territoire psychique. Passant à côté d’eux-mêmes, ils essaient de détruire le bonheur qui passe près d’eux. Prisonniers de la rigidité de leurs défenses, ils tentent de détruire la liberté. Etant incapables d’aimer, ils essaient de détruire par cynisme la simplicité d’une relation naturelle.

Le moteur du noyau pervers, c’est l’envie, le but de l’appropriation. L’envie est un sentiment de convoitise, d’irritation haineuse à la vue du bonheur, des avantages d’autrui. Il s’agit d’une mentalité d’emblée agressive qui se fonde sur la perception de ce que l’autre possède et dont on est dépourvu. Cette perception est subjective, elle peut même être délirante. L’envie comporte deux pôles : l’égocentrisme d’une part et la malveillance, avec l’envie de nuire à la personne enviée. Pour combler l’écart qui sépare l’envieux de l’objet de sa convoitise, il suffit d’humilier l’autre, de l’avilir. Ils cassent tout enthousiasme autour d’eux, cherchent avant tout à démontrer que le monde est mauvais, que les autres sont mauvais, que le partenaire est mauvais. Par leur pessimisme, ils entraînent l’autre dans un registre dépressif pour, ensuite, le lui reprocher.

Ci-dessous, nous avons eu envie de reprendre les propos de Valérie, 49 ans à l'époque, interviewée en Octobre 2018 par Olivier DELACROIX sur Europe 1. Valérie a vécu 15 ans avec une femme perverse narcissique et elle est sortie, non sans séquelles, de cette longue relation toxique. 

C'était des critiques perpétuelles, des remises en question, des suggestions, des injonctions... C'était en permanence, pour tout, pour rien : 'Tu ne sais pas faire la vaisselle', 'tu ne sais pas vider le lave-vaisselle', 'tu ne sais pas balayer', 'tu ne sais pas plier le linge', 'tu ne sais rien faire.'

J'avais l'impression que mon cerveau était piloté, qu'elle avait la télécommande et qu'elle pouvait me faire respirer quand elle voulait, perdre l'appétit quand elle voulait, provoquer des insomnies. Je somatisais beaucoup. Je ne savais pas que j'étais sous emprise. J'avais l'impression que j'étais la mauvaise personne et qu'il fallait que je fasse toujours mieux que ce qu'on me demandait.

...

C'était toujours les autres, toujours moi : 'Il faudrait que tu changes, ce n'est plus possible.' Elle profitait de ma faille. Sans faille, je ne pense pas qu'il y ait d'emprise. J'étais vraiment très, très amoureuse. J'étais persuadée qu'à un moment donné, elle pouvait être lucide et se rendre compte du mal qu'elle faisait. Je n'arrivais pas à comprendre que l'on puisse faire le mal pour le mal.

Aujourd'hui, je me sens beaucoup, beaucoup mieux. J'ai vécu vraiment pour l'autre pendant 15 ans. Je n'existais plus, je n'existais que pour elle. Ce sont des gens qui, en plus, sont chronophages, qui réussissent à vous faire penser que ce qu'il fait lui ou ce qu'elle fait elle, c'est beaucoup plus important que ce que vous faites vous."

Ce qui a permis à Valérie de prendre conscience de la nocivité de sa relation à sa compagne, c'est une conférence d'Anne-Laure BUFFET, psychothérapeute, conférencière et écrivain qui traitait de l'emprise. Cette conférence intitulée "L'emprise, la comprendre pour s'en libérer" est disponible en suivant ce lien et nous prenons la liberté de mettre ci-dessous le résumé de son livre, "Victime de violences psychologiques : de la résistance à la reconstruction".

Elles sont épuisées, dans l'incompréhension, détruites. Partagées entre la culpabilité, la honte, la peur, le doute, elles sont convaincues de n'être plus rien, de n'avoir jamais été qui que ce soit. Hommes, femmes ou enfants, elles se trouvent à côté de chez nous, dans notre rue, dans notre immeuble, parfois dans notre famille. Elles n'ont pas de blessure apparente. Elles sont en vie mais elles ne vivent pas. Elles survivent. « Elles », ce sont les victimes de violences psychologiques. Trop souvent, la violence psychologique demeure incomprise, voire réfutée. La plupart des spécialistes s'interrogent sur les pervers narcissiques en occultant leurs victimes.

Rares sont les témoignages masculins sur la perversion narcissique mais nous pouvons néanmoins citer celui de Christophe, 30 ans, homme et victime d'une perverse narcissique. Retrouvez l'intégralité de son témoignage sur ce lien vers le site Slate.

Pendant des années, j’ai entendu quotidiennement que j’étais inutile, moche, gros, bête. Ça s’est en fait empiré d’année en année: le ratio de bons et de mauvais moments s’est déséquilibré et a basculé uniquement dans le négatif. Avec l’excuse de préparer ses concours, elle m’a demandé de ne plus utiliser mes comptes sur les réseaux sociaux. Mais deux mois après, j’ai créé un compte Twitter anonyme comme soupape et moyen de converser avec des gens de l’extérieur, ce que je ne pouvais plus faire dans la vie. Elle l’a découvert et est entrée dans une rage folle, m’a attaqué avec une paire de ciseaux et a saccagé l’appartement où j’habitais. Elle est partie avec mon portable et les clés de l’appartement. J’y suis resté enfermé trois jours.

Un dernier témoignage nous a semblé avoir sa place ici, anonyme pour préserver l'entourage de cette jeune femme qui s'est livrée à nous en 2019, presque par hasard... merci à elle d'avoir partagé son histoire pour nous tous.

Il m'a fallu des années avant de me rendre compte que j'avais sombré dans une spirale infernale au fil de la relation dans laquelle je m'étais engagée avec Edouard, l'homme qui a partagé ma vie pendant 9 ans.

Les premiers temps, nous étions très amoureux, fusionnels et la bulle dans laquelle nous étions me convenait parfaitement. Je n'ai jamais eu le sentiment de m'éloigner de mes proches et c'est maintenant que je les retrouve que je prends la mesure de ce qui s'est passé.

Je dirais que l'emprise d'Edouard sur moi s'est faite sur les trois premières années de notre histoire, c'est arrivé insensiblement, en sourdine, presque délicatement. Sous couvert de "me tirer vers le haut" pour reprendre ses mots, Edouard me faisait sentir incomplète et incompétente dans la plupart des domaines. C'est difficile à expliquer parce que ça passe par de toutes petites choses qui, sorties du contexte général, peuvent paraître anecdotiques... Je n'étais jamais à la hauteur, il manquait toujours un truc, dans mes recettes, dans mes propos, dans mes opinions, dans ma façon de tenir la maison, de m'habiller, de travailler, d'organiser un voyage... Tout était sujet à amélioration et j'ai fini par y croire, j'étais convaincue de ma médiocrité.

A contrario, de son côté, il était formidable et tout le monde l'adorait, jusqu'à ma famille. Ses amis sont devenus mes amis et il contrôlait toutes mes interactions puisque je travaille à mon compte, à la maison. D'ailleurs, je me souviens d'avoir envisagé en 2017 de reprendre une activité salariée, au sein d'une équipe, pour rompre avec mon quotidien mais il n'a eu de cesse de me dissuader. Plutôt que de m'encourager à sortir de ma zone de confort, à m'épanouir, il m'a subtilement fait comprendre que j'étais faite pour travailler seule, que l'effet groupe n'était pas compatible avec ma personnalité en retrait, introvertie. Je comprends maintenant qu'il craignait ces rencontres qu'il n'aurait pas pu maîtriser. Depuis, je bosse en free lance et je vais d'une entreprise à l'autre, je me redécouvre une fibre très sociable et plutôt à l'aise avec les inconnus, l'exact contraire de l'image qu'il me donnait de moi.

Les deux dernières années ensemble ont été catastrophiques mais ça a permis ma libération. Tout a commencé après le décés de mon père, un départ brutal qui a ébranlé ma famille et dont je ne suis toujours pas remise. J'ai passé beaucoup de temps chez ma maman avec une de mes soeurs et mon absence était insupportable pour Edouard. Cette période a révélé à mes yeux la perversion narcissique qu'il cachait avec talent depuis des décennies.

Edouard vivait très mal la solitude, il me reprochait sans cesse de le délaisser. "Tu as de la peine, je suis là pour toi mais tu refuses mon amour, tu abandonnes notre couple au profit de ta mère alors que tu sais qu'elle n'a jamais été là pour toi". Mon lien avec ma mère a toujours été tendu et c'était une faille évidente pour Edouard, il savait que ce point était particulièrement sensible pour moi. Quand je suis rentrée chez nous et que le quotidien a repris son cours, Edouard s'est fait plus direct, comme s'il avait besoin de me visser un peu plus fort. Souvent, il s'est mis à me dévaloriser en public, il se moquait de détails et comme il a plein d'humour et de charisme, l'auditoire riait constamment.

Mes complexes ont été de plus en plus handicapants et pour couronner le tout, j'ai compensé en mangeant et j'ai grossi à vitesse grand V. Mon surpoids est vite devenu SON sujet de prédilection. Rarement devant les autres mais quotidiennement en privé, il multipliait les railleries autour de mes rondeurs "faudrait songer à changer de place dans notre lit, le matelas va finir par pencher de ton côté ma chérie...", "oh, ne mets pas cette robe, on dirait un loukoum, je voudrais pas qu'un autre te mange à ma place", "Au moins, je peux dire qu'elle n'a pas pris une ride la mienne !"... Feindre la gentille plaisanterie pour se prémunir de tout reproche. Les rares fois où j'ai tenté de rétorquer, je me suis retrouvée dans la position de l'idiote susceptible qui n'a aucun d'humour, à tel point que je finissais par m'excuser, rampant pour qu'il me pardonne d'avoir été si caractérielle.

Un soir où j'étais déprimée, nous recevions des amis, la soirée était gaie alors que je me sentais vidée. Une copine présente ce soir là s'est inquiétée de mon état et j'ai essayé d'exprimer mon malaise mais Edouard a très vite capté qu'il y avait anguille sous roche, je me livrais à une autre personne que lui, il s'est rué sur nous, coupant la conversation. Nous nous sommes retrouvés dans la cuisine et dès que nos invités ne pouvaient plus nous voir, il a saisi mon bras, serré très fort et chuchoté ces mots; "alors je vais être très clair, tu te ressaisis, je ne sais pas ce que t'as en ce moment mais c'est ridicule, tu as tout pour être heureuse, je suis là pour toi, nous aurons bientôt un bébé, c'est ça qui manque à ta vie alors souris maintenant et on va servir le repas ensemble".

Ce moment précis a été un déclic pour moi. On avait parfois parlé de devenir parents mais ce n'était pas un sujet d'actualité et j'ai tout à coup senti l'étendue de son pouvoir sur moi. Il manipulait tout aux fins de me garder sous son contrôle, j'étais comme un pantin. La suite n'a fait que confirmer ma révélation. Le lendemain, j'ai souffert d'une gueule de bois terrible parce que j'avais abusé sur le vin la veille, il a passé la journée à me traiter d'ivrogne et à me blâmer pour mon comportement inadmissible de la veille. J'avais pourtant été relativement modérée en dépit de mon état, je n'avais pas fait de vagues mais j'étais néanmoins dépeinte comme une délurée qui mettait la honte sur son foyer, devant SES amis...

Par la suite, l'escalade n'a pas cessé et plus je cherchais à me rebeller, plus violente était sa réaction. Il a fini par me menacer de se suicider, il s'est victimisé au point d'alerter ma famille, mettant en doute mon équilibre psychique pour inciter mes proches à me faire revenir sur terre. Heureusement, ma soeur a vu clair dans son jeu, elle s'inquiétait depuis longtemps de l'influence délétère qu'il avait sur moi. Je me suis réfugiée chez elle et il a fallu couper totalement les ponts avec lui pour me donner la force d'aller de l'avant.

Je suis passée par des hauts et des très bas, j'ai débuté une thérapie qui m'a énormément aidée, j'ai incité Edouard à faire de même mais en vain. Nous ne sommes pas croisés pendant un an, j'ai récupéré mes affaires par l'intermédiaire d'une voisine mais ça tenait dans quelques valises car je ne voulais rien garder qui me rappelerait notre histoire. Quand je l'ai revu, il était accompagné d'une jeune femme qui me ressemblait, son regard sur moi a été d'une froideur horrible, j'ai cru m'écrouler sur place. Il a fait mine de ne pas me connaître et ils ont poursuivi leur chemin mais je suis certaine que celle qui était à ses côtés a compris qui j'étais. J'ai surtout de la peine pour elle et il m'arrive d'avoir envie de lui écrire, de lui dire ce que j'ai traversé et de la mettre en garde. Je le ferai peut-être un jour.

En tous cas, je veux dire à celles et ceux qui ont le sentiment de vivre une relation toxique avec une personne perverse narcissique de se faire aider. Parlez-en autour de vous et essayez de vous confronter à vos réalités plutôt que de continuer à les subir. Nous sommes tous et toutes capables de sortir de l'emprise d'un pervers narcissique.

A l'image de ce témoignage, nous encourageons au dialogue, il faut rompre le cercle vicieux et ne pas hésiter à en parler, à verbaliser le mal-être.

Nous sommes compétents pour vous aiguiller vers les bons référents et si vous ne savez pas par où commencer, nous pouvons vous apporter un soutien. Contactez-nous ici et nous reviendrons très rapidement vers vous.